Stations
Séminaire du Collège international de philosophie et de l’Institut des hautes études en psychanalyse, organisé par Jérôme Lèbre
Jeudi 24 mars, avec Arlette Farge:
« Les moments d’arrêt d’un réel mouvementé –
foule, corps et émotions dans le XVIIIe siècle populaire »
18h-19h30
Lycée Hélène Boucher, 75 cours de Vincennes, 75020 Paris, salle Louise Fontaine. Avec la participation d’Eric Godeau, professeur d’histoire en khâgne au lycée Hélène Boucher. Ouvert à tout public ; pour les personnes extérieures au lycée, inscription préalable par mail à l’adresse lebrejerome@sfr.fr.
avec la participation d’Eric Godeau, professeur d’histoire en classe préparatoire au lycée Hélène Boucher
Lycée Hélène Boucher, 75 cours de Vincennes, 75020 Paris, salle Louise Fontaine. Ouvert à tout public ; pour les personnes extérieures au lycée, inscription préalable par mail à l’adresse lebrejerome@sfr.fr.
La foule « offre au pouvoir en place l’image d’une mobilité désordonnée », son inquiétude, son émotivité sont « toujours en éveil », la rue est « mouvante et complexe ». En lisant les archives Arlette Farge a déplacé le regard porté sur le XVIIIe siècle vers la vie malmenée du peuple et redonné à cette période une actualité bien différente de la simple opposition entre la monarchie et la philosophie des Lumières. Il fallait cette perspective pour retrouver au cœur du mouvement et des émotions des moments d’arrêt, le plus souvent liés à la saisie des corps comme des paroles par le pouvoir « en place ». Quand la vie se déroule dehors, sans travail ni logis stables, alors la possibilité s’ouvre de s’arrêter – ou d’être arrêté – sur les chemins comme en pleine rue.
Cette séance de séminaire, ouverte à tout public inscrit offre aussi l’occasion aux élèves et étudiants du lycée Hélène Boucher de rencontrer une grande historienne qui les a précédés dans l’établissement. Pour cette raison notre entretien avec Arlette Farge inscrira le thème de recherche dans une présentation plus générale de son approche de l’histoire.
Fragonard, La Charrette embourbée
Argument du séminaire (1er semestre 2016)
Sois sûr d’avoir épuisé tout ce qui se communique par l’immobilité et le silence (Robert Bresson, Notes sur le cinématographe).
Dans ce séminaire l’immobilité est étudiée non comme le simple négatif du mouvement, mais comme une situation incontournable qui ressort discrètement dans un monde mobile. Se refusant à toute éternisation, l’immobilité se dissémine en une multiplicité de stations, images, textes, corps, pensées, si bien que l’on peut aller loin sans faire un seul pas.
Le séminaire « stations » (argument général ci-dessous) se concentrera cette année sur les situations d’immobilité collective : nous nous intéresserons à ce qu’attend le droit de ce qu’il présente comme une simple privation de mouvement (l’arrestation) et donc à la vie dans les prisons ; mais aussi à l’immobilisation dans les transports, dans les hôpitaux, à la fonction de la position assise dans les écoles (quelles contraintes exerce l’école sur le corps des élèves, parvient-elle à les compenser et comment, que dire de ce concept discuté et à coup sûr contestable d’ »hyperactivité » ?), au problème des troupes arrêtées en stratégie militaire et policière, au rôle tout aussi stratégique de l’immobilité dans les manifestations… Nous nous demanderons si l’immobilité est simplement contrainte voire disciplinaire et ce qui reste d’une statique libre, résistante. Plus généralement, le peuple est-il par essence mobile ? Que serait un peuple totalement ou partiellement statique, qui ne « circule » plus ? Aurait-il encore une identité de peuple ? Il s’agit généralement de savoir à la fois comment on la tolère l’immobilité et comment on la tient. Il ne s’agit pas simplement d’en faire l’éloge ou la critique, mais de la rechercher, dans une suite d’entretiens. Chaque séance est indépendante depuis le début de ce séminaire.